jeunes et cons - rocky

« Shit. » Elle vide une seconde fois son sac sur la table basse, soupire lorsqu'elle constate que son portefeuille ne s'y trouve effectivement pas et que ça ne sert à rien de l'invoquer puisqu'il n'apparaîtra pas magiquement sous ses yeux. Elle passe en revue ses dernières allées et venues, se dit qu'elle doit forcément l'avoir oublié lorsqu'elle est allée chez Rex puisqu'elle avait auparavant acheté un café sans s'attarder. Elle fouille un peu dans les tiroirs afin de trouver quelques pièces de monnaie pour payer l'autobus qui la mènera jusqu'à l'appartement du gardien de sécurité, sourit lorsqu'elle met la main sur un billet de plusieurs livres qu'elle glisse rapidement dans la poche arrière de son jean, persuadée que Cináed ne s'en rendra même pas compte.

Si le trajet s'avère long et ennuyeux jusqu'à l'édifice abritant l'appartement de Rex, la blonde a pourtant déjà hâte de le revoir. Elle le trouve séduisant lorsqu'il se concentre sur les différents exercices de grammaire qu'elle a préparés pour lui et est heureuse de constater qu'il semble prendre au sérieux les leçons, même si elle ne dirait pas non à un peu d'activité physique pour l'aider à assimiler les conjugaisons.

La marche nécessaire pour rejoindre l'appartement masculin n'est pas bien longue et lorsqu'elle se trouve enfin devant la porte, quelques coups sont frappés avec entrain.

Pourtant, la silhouette qui se dresse devant elle quelques secondes plus tard ne ressemble en rien à celle de Rex et même si la blonde doit admettre que le plus jeune des deux est également mignon, elle demeure silencieuse pendant un court instant, surprise par l'apparition. Elle jette un bref coup d'oeil au numéro de la porte afin de s'assurer qu'elle est au bon endroit, reporte finalement son attention sur le garçon qui l'accueille.

« Rex est pas là ? » demande-t-elle finalement avant de plisser légèrement le nez et de jeter un coup d'oeil par-dessus son épaule. « Je suis venue un peu plus tôt aujourd'hui et je pense que j'ai oublié quelque chose. Je vais aller le chercher, ce sera moins compliqué. » Elle glisse sous son bras, retire ses chaussures d'un coup de talon et se dirige vers le salon, là où elle trouve exactement ce qu'elle cherche. « Tadam ! » Elle se retourne joyeusement afin de faire face au garçon, le détaille doucement de haut en bas avant de planter ses prunelles dans les siennes.

« T'as l'air de pas avoir grand chose à faire. Je peux te tenir compagnie ? » demande-t-elle alors qu'elle se laisse tomber sur le canapé et qu'elle l'observe, espiègle.

Le nez plongé dans ses croquis et la concentration à moitié grignotée par l’une de ces émissions de question/réponse dont il était accro, Rocky ne marque une pause dans ses coups de crayon que pour pester contre l’image qui fige ou lorsque le présentateur s’apprête à donner le verdict final. Le gamin est un véritable affront à la culture générale, répond à côté de la plaque les trois quart du temps mais ne peut pas s'empêcher de rager contre la somme d’argent qu’il aurait pu rafler à chaque bonne réponse qu’il donne depuis son salon. Un soupir agacé quitte ses poumons lorsque trois coups déterminés retentissent à la porte. Il n’attend pas de visite et est bien tenté de jouer la sourde oreille plutôt que s’embêter à ouvrir pour signaler l’absence de Rex qui serait tout aussi évidente s’il ne bougeait pas de son canapé mais il est rapidement rattrapé par l’infime chance qu’il puisse s’agir de quelque chose d’important, pour une fois. Il s’attend à tomber sur n’importe quel visage connu, comme celui d'une vieille voisine tombée en panne de sel ou d’une connaissance de passage dans le quartier venue partager une chope avec le mastodonte de cet appartement mais certainement pas à celui d’une gamine qui semble avoir le même âge que lui, si pas moins. La surprise est telle que Rocky en perd toute trace de courtoisie, reste simplement là à la regarder comme si elle était tout droit descendue d’une autre planète jusqu’à ce qu’elle ne se décide enfin à lui expliquer la raison de sa venue. Le brun n’a pas le loisir de lui suggérer de repasser plus tard que déjà, la blonde s’engouffre sans même attendre d’y être invitée.

Persuadé qu’elle s’éclipsera aussi vite qu’elle s’était immiscée dans leur intérieur, Ledoux reste appuyé dans l’embrasure de la porte et l’observe réfuter habilement cette théorie en s’échouant confortablement sur le canapé. C’était vraiment une question ? Il referme l'appartement derrière lui alors que des informations la concernant refont surface jusqu'à son cerveau, vestiges d'une conversation tenue avec Rex quelques jours plus tôt. Moira, c’est ça ? Eden lui avait vaguement parler d’une histoire de cours à domicile, juste de quoi se mettre à niveau pour ne pas se retrouver complétement largué par les devoirs que Pearl leur ramenait parfois à la maison. Je crois que c’est raté pour l’interro surprise, on dirait bien qu’il a décidé de faire le mur. Il lui adresse un sourire alors qu’il se penche pour rassembler ses gribouillis qu’il jette sur la table basse et rouler son édredon en boule pour lui offrir un peu plus de place sur ce canapé qui lui servait également de lit, de bureau et de table de repas. Tu veux quelque chose à boire ? Il risque de pas rentrer avant un moment. Loin d’être réputé pour être la distraction de l’année, Rocky insiste sur le retour peu probable de Rex, s'assure qu’elle soit assez sûre de sa décision pour ne pas s’infliger une soirée d’ennui inévitable pour rien.

« Pas trop. » lance-t-elle joyeusement alors que ses prunelles se plantent dans les siennes et qu'elle hausse légèrement les épaules. « C'est ça. Par contre, moi, je ne connais pas ton nom. » ajoute-t-elle innocemment alors qu'il s'approche pour lui faire de la place. Il attire rapidement l'attention de la blonde sur les dessins qu'il rassemble et la jeune fille étire simplement le bras pour récupérer les croquis qu'il vient pourtant de poser sur la table basse.

Elle tourne la première page, redresse les yeux vers lui à sa blague en guise d'explication pour l'absence de Rex, espiègle. « T'as l'air si doux comme ça, mais tu peux même être drôle ! » ajoute-t-elle avec un large sourire alors qu'il lui propose quelque chose à boire. « Une bière ? Mais seulement si tu m'accompagnes. » Elle arque un sourcil amusé, reporte son attention sur les dessins qu'elle tient toujours à la main et qu'elle feuillette doucement. Parfois déconcentrée par la télévision, Moira relève les yeux avant de parcourir les traits qu'il a si joliment posés sur les feuilles de papier. Elle n'est elle-même pas très créative et son esprit très cartésien l'empêche souvent de s'abandonner à l'inspiration alors qu'elle a beaucoup de difficulté à accepter la défaite et que ses oeuvres devraient toujours être parfaites, du premier coup. Elle préfère laisser ce loisir à ceux qui sont réellement doués, ne peut toutefois pas s'empêcher d'apprécier l'imagination des autres.

« C'est joli, ce que tu fais. »

Elle dépose les dessins sur la table et se relève d'un bond pour le rejoindre à la cuisine, iris posées sur la silhouette du brun qui lui tourne le dos.

« Alors. » débute-t-elle en se hissant sur la table de la cuisine pour s'y asseoir, sans gêne aucune. « T'as l'air gentil et tu peux être drôle. Tu dessines bien et t'es mignon. Qu'est-ce que tu caches ? Tu caches forcément quelque chose ! » lance-t-elle en riant alors qu'elle ne le quitte pas des yeux et qu'un sourire étire le coin de ses lèvres. « Je suis ton genre ? » l'interroge-t-elle un peu plus sérieusement, néanmoins convaincue qu'elle saura lui soutirer une petite rougeur aux joues à la suite de ces paroles pourtant gonflées de sincérité. Moira ne sait pas mentir, de toute façon, manque même probablement de tact pour dire les choses et devrait sûrement apprendre à se la fermer lorsqu'elle sait pertinemment qu'elle parle trop.

Elle se tait enfin, prunelles rivées sur la silhouette et la gestuelle du brun afin de jauger la réaction qui sera la sienne à la suite de toutes ses questions.

Rocky. Qu’il répond du tac au tac lorsque Moira lui demande quel prénom poser sur son visage. Ca fait tellement longtemps qu’on ne l’a plus appelé par son vrai nom qu’il est devenu instinctif pour lui de l’occulter systématiquement par son surnom depuis toujours. Un sourire étire ses lèvres quand la blonde lui sert précisément la réponse à laquelle il s'attendait. Va pour la bière, alors ! Rocky n’aime même pas ça mais il fait pourtant l’effort de se mettre dans la peau d’un jeune de son âge pour ne pas avoir l’impolitesse de la laisser boire toute seule. Le dos tourné, il ne remarque pas de suite qu'elle s’est emparée de ses dessins et est à présent en train de les analyser en détail. S’il n’était pas aussi intimidé par cette présence nouvelle dans leur antre masculine, très certainement qu’il aurait déjà bondi par-dessus la table basse pour lui arracher des mains et les planquer là où personne ne pourrait les retrouver, si sensible à la moindre critique qui pourrait lui faire remballer sa créativité à vie qu’il préfère les garder cachés à la vue de tous comme un précieux butin. Sa tension redescend cependant d'un cran lorsqu'elle lui adresse un compliment suffisamment sincère pour être vrai et auquel il répond d'un simple remerciement de la tête qui se veut le moins sceptique possible.

Deux bières fraîches à la main, le gamin n’a qu’à se retourner pour tomber nez à nez avec Moira qui a pris ses aises sur la table de la cuisine, ce qui est loin de l’indigner, pour avoir passé toute son adolescence avec Rex pour qui les manières n’avaient pas énormément d’importance, du moment que Pearl ne se trouvait pas dans la même pièce qu'eux. Le brun lui glisse la boisson entre les mains et fait cogner convivialement sa bouteille contre la sienne tout en s’installant à ses côtés. Surpris par les suspicions malgré tout fondées de l'intruse, il avale sa première gorgée de travers et peine à étouffer un rire alors qu’il pose ses yeux dans ceux de la blonde pour la première fois depuis qu'il a ouvert la porte à cette tornade à l'apparence d'une femme. Je sais pas ce qui est le plus louche entre avoir toutes ces qualités et faire quatre compliments dans la même phrase à un strict inconnu. Amusé, le gosse est loin de s’imaginer qu’elle n’en a pas encore fini avec lui. La seconde interrogation suit la première de très près, le poussant à poser sa bouteille à côté de lui – où il la délaissera probablement pour un moment – et se tourner vers elle pour faire mine de l’examiner attentivement sous toutes ses coutures. Ca dépend, t’es susceptible ?Quelle que soit sa réponse, la vérité qu'il s'apprêtait à lui mettre sous le nez n'allait sûrement pas lui plaire mais ça n'effleure même pas l'esprit du brun qui ne s'est jamais caché de ses préférences sexuelles. D’ailleurs, il avait rarement besoin de les étaler au grand jour pour que les autres les devinent. Disons que mon genre, c’est l’autre genre. Autant j’ai les mêmes goûts que toi en matière de mecs, qui sait. Le bouclé n'attend pas de jauger sa réaction face à cette révélation pour répondre plus précisément à la question qu'elle se posait. Mais ça t’empêche pas d’être très jolie, hein. Et ça, il n’avait pas besoin d’être attiré par les filles pour le reconnaitre.

« Santé ! » lance-t-elle joyeusement lorsqu'il trinque avec elle avant de prendre une longue gorgée de bière. C'est définitivement à l'université que la blonde a appris à apprécier cette boisson qui lui avait toujours soutiré des grimaces auparavant. Pas trop cher, en abondance lors des soirées étudiantes, Moira n'avait pas pu faire la fine bouche et s'était contentée des bières qu'on glissait entre ses doigts. Elle arque un sourcil amusé lorsque sa question le fait rire, plonge ses prunelles dans les siennes alors qu'elle s'attend réellement à une réponse de sa part. Elle lui donne un léger coup de coude à sa remarque alors qu'une moue faussement accusatrice ourle ses lèvres. « Je suis gentille, moi. Les compliments, c'est gratuit ! » affirme-t-elle alors qu'elle abandonne pour l'instant sa première question pour en formuler une seconde, beaucoup plus intéressante. Après tout, ce qu'il dissimule ne la concerne pas et il ne lui semble pas très menaçant, d'autant plus qu'il partage l'espace de vie de Rex et que ce dernier ne laisserait jamais un connard fini dormir chez lui. N'est-ce pas ?

Un peu vexée par son interrogation, Moira fronce les sourcils.

« Toutes les femmes sont susceptibles. Choisis bien tes mots. » gronde-t-elle d'un air à moitié sérieux.

La révélation tombe rapidement et Moira en profite pour l'observer davantage alors qu'il poursuit sur sa lancée et qu'il termine par un compliment qu'elle devine sincère, mais qui n'a pas la même saveur. Pourtant, elle devrait être contente qu'on la qualifie de jolie et non pas de baisable en lui offrant ce sourire pervers qui caractérise tous ceux qui regardent les femmes comme des morceaux de viande, mais elle fait légèrement la moue, glisse ses pieds au sol pour se planter devant lui.

« Me dis pas que t'as un crush sur Rex ? » demande-t-elle en arquant un sourcil surpris avant de rompre la distance qui les sépare pour poser ses mains de chaque côté des cuisses masculines, sourire mutin aux lèvres. « T'as déjà essayé, avec une fille ? Je sais pas, moi, t'es peut-être bi. » propose-t-elle alors qu'elle effleure l'extérieur des cuisses du bout des pouces.

Elle fait mine de réfléchir encore un peu, relève les yeux pour plonger ses iris dans les siennes.

« En fait, j'ai une question. » souffle-t-elle alors qu'elle avance un peu son visage vers lui, dents qui mordillent sa lèvre inférieure alors qu'elle cherche définitivement à provoquer une réaction chez lui. « Si tu fermes les yeux et que je te touche, tu peux imaginer que c'est quelqu'un d'autre ou bien ça ne te fait rien du tout ? » Curieuse, la jeune fille recule d'un pas et détache les premiers boutons de son cardigan, le regard toujours rivé dans le sien. « Et ça ... ? » Elle abandonne le cardigan entièrement ouvert sur le haut de ses bras, retrouve sa place plus près de lui et s'approche pour lui dérober un rapide baiser.

L’amusement s’empare des traits fatigués de Rocky alors qu’il devine à l’humeur passagèrement assombrie de la blonde que son ego s’apprête à être froissé et réfléchit probablement déjà à sa riposte avant même de lui avoir laissé l’occasion de rendre son verdict. D’une question piège habilement posée, Moira avorte aussi sec son envie de pousser la taquinerie un peu plus loin. T’es sérieuse ? Rex ? Si le gamin ne pouvait nier son attachement flagrant envers le colosse, le désir n’avait jamais trouvé sa place au milieu des sentiments forts qu’il ressentait à son égard. Tu fantasmerais sur ton père ou ton frère toi ? Ce sont les premiers exemples concrets qui lui traverse la tête pour illustrer ce qu'Eden représentait pour lui et souligner avec indignation l’absurdité qu'elle venait de proférer. Un frère, l’alter ego masculin d’Estrela, c’est comme ça qu'il définissait sa relation avec Rex mais aussi le raccourci qu’il prenait volontairement lorsqu’il en avait marre de se fatiguer à expliquer aux plus curieux leur lien de sang inexistant. Je les préfère quand ils sortent pas avec ma sœur. Adolescent comme les autres, il lui arrivait souvent de laisser germer des pensées inavouables dans son esprit lorsque son regard glissait sur la silhouette d'hommes qu'il trouvait suffisamment à son goût mais elles ne s’étaient jamais dirigées vers cet homme qu’il avait presque connu plus longtemps que ses propres parents.

S’il s’était paré à faire face à tout un éventail de réactions possibles face à l’annonce de ses penchants, allant du rire nerveux traditionnel au changement de sujet inopiné en passant par l’hostilité, jamais Rocky ne s’était attendu à ce qu’elle remette ses attirances en doute, encore moins en tentant de se le confirmer par elle-même. Ca se saurait si c’était aussi facile. Il aurait voulu pouvoir révolutionner sa sexualité au gré de ses envies, qu’elle ne soit qu’un interrupteur qu’on enclenche ou éteint selon la situation, peut-être que là il aurait pu faire la fierté de ses parents sans incommoder leurs principes ancestraux au point de provoquer une crise familiale sans retour mais quitte à être malheureux, le gamin avait préféré renoncer à son confort plutôt que passer sa vie à mentir à propos d’une vérité qu’il n’avait aucun mal à admettre.

Fuyant, le regard de Ledoux ne trouve plus où se poser sereinement afin que la blonde ne tire pas de conclusion hâtive malgré son désintérêt le plus total. Les épaules dénudées de Moira ne lui font ni chaud ni froid. C’est ce qu’il est sur le point de lui confesser lorsque les lèvres de l’Irlandaise capturent les siennes l’espace de quelques secondes. Fauché par l’effet de surprise, il faut un instant au cerveau du bouclé pour reconnecter avec la réalité. C’est bon, t’as fini ? Complice malgré tout, Rocky attrape les pans de son cardigan pour les rabattre sur sa peau dévêtue et lui signaler maladroitement que les choses en resteront là. Désolé d’avoir à compromettre ton pouvoir de séduction mais il semblerait que ta tentative d'ensorcellement n'ait pas pris. A moins que tu n’essayais de me transformer en marbre ? Il laisse un rire sincère détendre l’atmosphère et alors qu’il réfléchit à la meilleure manière de la repriser sur sa façon étrangement directe de faire connaissance, une théorie qu’il ne peut ignorer s’impose à son esprit. Attends, tu lui donnes ce genre de cours ? Et si ses leçons particulières en tête à tête avec Rex n’étaient pas ce qu’elles laissaient paraître ? Il regrette déjà d’avoir posé la question.

« Quoi, Rex ? » demande-t-elle, innocente, alors qu'elle se plaît à détecter la surprise sur les traits du garçon. Rocky poursuit sur sa lancée en la rassurant sur le lien qu'il partage avec le colosse et le regard soudain brillant de la blonde trahit probablement son intérêt. Pourtant, la suite ternit rapidement ses prunelles et les lèvres de la gamine s'entrouvrent légèrement sous le coup de la stupéfaction. « Il sort avec ta soeur ? » Jamais Moira n'aurait pu se douter que Rex était déjà en couple puisque même si elle ne le connaît pas beaucoup - voire même, pas du tout - elle ne l'a jamais vu en compagnie d'une femme de laquelle il aurait pu être proche.

Jamais.

Elle a le coeur qui se débat à l'idée de le savoir déjà en couple avec une autre, même si elle ne le connait pas suffisamment, même si elle sait que l'attirance qu'elle éprouve pour lui n'est probablement pas réciproque. Moira ne sait même pas ce qu'elle veut, mais elle ne s'attendait définitivement pas à ce que Rocky lui avoue une chose pareille, comprend un peu mieux qu'il n'ait jamais été attiré par le blond si ce dernier sortait avec sa soeur. Il aurait pu, évidemment, mais il n'aurait peut-être jamais osé le dire.

Si Moira est désormais presque persuadée qu'il dit vrai lorsqu'il affirme aimer les hommes, elle ne peut pas s'empêcher de pousser plus loin son investigation en abandonnant son cardigan sur le haut de ses bras et en capturant ses lèvres pour un baiser plutôt chaste, même si les doigts glissent sur sa cuisse pour maintenir son équilibre plus aisément. Rocky demeure complètement immobile, visiblement étonné par son audace alors qu'il étire finalement les bras pour ramener le vêtement sur ses épaules et ainsi dissimuler l'épiderme découvert de la blonde. Moira soupire longuement et croise les bras, plantée devant lui, et écoute attentivement ce qu'il a à lui dire, le goût des lèvres du brun imprégnant toujours les siennes. Persuadée qu'il embrasse bien lorsqu'il y met du sien, elle est un peu déçue de ne pas avoir pu en profiter pleinement, mais décide néanmoins de ne pas poursuivre ses provocations. « C'est vraiment tout ce que ça vous fait, d'embrasser une fille ? » Vous. Les gays, quoi. Bien malgré elle, subtilement, ses iris se posent sur le corps du brun, mais elle ne remarque aucun désir, aucun frisson qui le parcoure alors qu'elle est pourtant encore tout près, sa cuisse frôlant la sienne.

La question du brun lui soutire un sourire espiègle alors qu'elle se mordille légèrement la lèvre, s'amuse de la pudeur masculine.

« Rex n'a pas besoin de cours pour ça. » lance-t-elle, mutine, avant de hausser les épaules, amusée de faire naître en lui des idées pareilles alors qu'elle devine dans chacune de ses réactions une surprise et un bouleversement qu'elle ne comprendra probablement jamais. Rocky est trop chaste, trop doux, et pourtant, la jeune fille glisse un baiser sur sa joue et lui attrape la main pour l'inviter à la suivre jusqu'au salon, là où elle se laisse tomber sur le canapé, le brun à ses côtés, sa bière à la main.

Sourcils légèrement froncés, elle se retourne entièrement vers lui, les yeux brillants de malice.

« Tu n'as pas répondu à ma question. Tu as déjà essayé, avec une fille ? » demande-t-elle avec un large sourire, sur le ton de la confidence. « Tu veux regarder un film ? » demande aussitôt la blonde alors qu'elle s'incruste dans son quotidien sans réellement lui demander son avis, convaincue qu'il a besoin d'une fille comme elle dans sa vie.